Les paysans-producteurs présentés jusqu’alors offraient des produits plutôt faciles à trouver dans notre région. Là, KléZia s’est confrontée à un os ! Trouver un producteur local de lupin, et si possible de farine de lupin… Après pas mal d’efforts, KléZia a déniché une petite merveille : La Ferme du Val de Save. Située à moins de 65 km de chez KléZia, j’arrive, attendue.
C’est d’abord Veron, le grand chien blanc de la famille qui m’accueille. Puis Michel, Chantale, Julie et Manu, les amis .
Comment l’histoire a débuté ? Qui êtes-vous, que faites vous, depuis quand, qu’est ce qui vous a mené à ce projet.
Rien d’original, fils de paysans, mes parents avaient une ferme voisine. Ils y cultivaient des céréales et même du tabac ! En conventionnel bien sûr. Le bio n’existait pas encore à leur époque. J’ai tout naturellement repris la suite en 1982 en m’installant à mon compte. Je suis passé en bio en 2010.
Quel a été le déclencheur ?
En 2008–2009, nous avons passé des sales moments. Les prix d’achat de nos productions ont chuté et nos récoltes avec. Certains paysans du coin et moi-même souhaitions sortir de ce système. C’est là que le Bio nous a semblé être une bonne échappatoire. Grâce à plusieurs formations en agriculture bio et les échanges entre paysans déjà dans cette dynamique, la Ferme est entrée en 2010 dans l’ère du BIO pour son plus grand bonheur ! La terre est heureuse, les rendements satisfaisants, le paysan aussi 😉
C’est une autre façon de travailler, plus épanouissante et constructive, même si je ne vous cache pas que le travail est plus intense. Je n’avais pas autant de variétés avant. J’essaie de nouvelles semences en fonction des envies, des disponibilités des producteurs. Je travaille sur des semences de population que j’échange bien souvent avec d’autres paysans. Je ne les achète presque plus vu que je récolte les miennes.
Aujourd’hui, quelles valeurs défendez-vous et comment cela se matérialiset-t-il au quotidien?
On ne se contente pas de coller au cahier des charges, on va plus loin. On pratique l’assolement ou la rotation des cultures et sur l’agronomie des sols ( respect de la vie microbienne ) ; pas d’intrant, ajout d’engrain organique…
La ferme est partenaire de l’association GAB32 ou Les Bio Du Gers (Groupement des Agriculteurs Biologiques et Biodynamiques ) et des Compagnons de l’Audace ou je crois bien maintenant appelés Les Compagnons du Vivant, au service de l’agriculture et des circuits cours (Future coopérative d’intérêt collectif ) contact@les compagnonsduvivant.org
Concrètement que produisez-vous ?
Aujourd’hui, j’exploite 77 hectares des variétés céréalières : blé tendre, sarrasin, seigle, avoine blanche, petit épeautre, lin brun & des légumineuses : pois chiche, lentilles, tournesol, soja et depuis peu du lupin 😉 et luzerne (4 ans d’implantation pour l’agronomie des sols et restitution de l’azote sur blé )
J’en transforme certains en farines de blé, sarrasin, lupin, je propose aussi des flocons d’avoine.
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Jusqu’en 2014, et par manque de ressources financières, je vendais toutes mes productions directement aux coopératives du coin. S’il est vrai que la transformation est un plus économique et un gain d’autonomie, elle n’est pas forcément accessible. C’est grâce à quelques aides régionales que j’ai pu offrir à la ferme un nouvel élan. Nous avons accueilli notre moulin à farine type ASTRIE. C’est un moulin qui écrase finement le blé sur une meule de granit, et sans surchauffe. On obtient donc une farine nutritive. D’ailleurs, je ne vends pas de farine blanche mais de la T80 minimum.
En effet, une farine blanche est une farine qui a perdu son enveloppe, le son, porteur de fibres et micro-éléments. Consommer de la farine blanche, revient, tout comme le sucre blanc à manger des « calories vides ». Outre son Indice Glycémique des plus élevés, elle va déminéraliser le corps. Lorsqu’on apporte quelque chose à notre corps, il redonne d’autres éléments en retour. Là, si on apporte seulement des calories ou macro-éléments (glucides, lipides, protides), notre corps nous donne des micro-éléments (vitamines et minéraux). A nous les manques de magnésium, de fer, les fatigues et les fringales… Comme dans la vie, tout est échange. Si on reçoit sans donner, ça ne dure qu’un temps.
J’ai aussi investi dans une brosse à grains. Je crois que nous ne sommes pas nombreux à avoir cet appareil.
Certaines personnes me disent consommer tout bio sauf la farine. La bio n’est pas traitée et donc susceptible de voir développer de petits champignons pouvant causer de graves maladies. Alors que si elle est traitée… C’est essentiellement dû à la propreté du grain. Regardez comme c’est parlant…
Voilà ce qu’on retrouve bien souvent dans les farines bio, même les plus qualitatives. Même nous, nous sommes à chaque fois surpris de voir ce résultat. Contrairement aux légumineuses ou grains entiers, on ne peut pas la rincer… Donc chez nous, on brosse le grain avant de le moudre !
Et pour finir on a un séparateur de grains qui nous permet de trier mécaniquement les graines de lin par exemple et une floconneuse pour faire les flocons d’avoine que nous fournissons à KléZia.
Vous voyez, l’indépendance est un réel plus mais elle a un prix que tout le monde n’est pas encore prêt à payer. C’est un travail d’endurance. Avant on travaillait environ 6 mois dans l’année avec un faible retour sur investissement. Maintenant on travaille quasiment tout le temps, on a beaucoup investi sur l’avenir, mais on récolte bien plus à tous les niveaux. Désormais on ne peut compter que sur nous et l’entraide locale. On a même créé un site internet, chose que nous n’avions pas avant. On se modernise 😉
Des projets ?
On pense à se lancer dans la culture de blés anciens très prochainement et à gentiment développer la vente directe.
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KléZia s’approvisionne principalement chez vous en lupin. Cette farine qui donne ce petit goût biscuité si particulier et un intérêt nutritionnel indéniable. Pourriez-vous nous en dire plus sur sa culture, ses avantages et inconvénients ?
Alors le lupin, c’est LA nouvelle aventure. Cette protéagineuse est curieusement peu cultivée dans la région contrairement au soja.
Comme son nom l’indique, cette graine est riche en protéines (40%) et en fibres (30%), mais faible en amidon, ce qui en fait une farine à Indice Glycémique Bas. En plus de cet avantage, elle est naturellement sans gluten. Classée dans la catégorie farine lourde, il est conseillé de l’utiliser en mélange. C’est une farine nutritive qui pourra donc s’utiliser dans un mix de farine pour réaliser des pâtes (cake, crêpes…) mais aussi pour lier des sauces/crèmes en remplaçant les oeufs de part sa haute teneur en protéines.
Nous avons choisi du lupin blanc de printemps non toxique, car tous ne le sont pas ! Il se sème à partir de Février, pour se récolter bien sec 4 mois après environ. Ensuite on le stocke et on le moud. L’enveloppe du lupin, bien plus épaisse que celle du blé, ne s’appréhende pas de la même façon. Nous peaufinons donc encore notre méthode pour obtenir une jolie farine bien lisse.
C’est le moment pour moi de faire mes emplettes ! Je découvre au passage l’ensacheuse, la machine qui coud les sacs de farine et que je n’arrive jamais à défaire comme il se doit… Si quelqu’un connait l’astuce 😉
Avec qui travaillez-vous ?
Professionnels : KléZia, Collège (Samatan), Coopératives
Où vous trouver ?
*Chez nous. Par contre il est impératif de nous contacter avant au 06.14.41.50.25
Plus d’informaitons : https://fermeduvaldesave.free.fr/index.htm
*En magasin : Intermarché (Lombez), Super U (l’Ile jourdain), Cesta’bio (Samatan)
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Et moi, je repars avec mes sacs de farine de Lupin, un grand sourire aux lèvres et remplie de belles émotions après ce vrai moment de partage. Je suis toujours surprise de voir des accueils aussi chaleureux et sincères. La vie est belle !